Quand l’État travaille avec les communautés du logiciel libre


Engagé dans la modernisation de son infrastructure informatique et le développement de nouveaux services, l’Etat compte plus que jamais sur le logiciel libre et sur ses communautés. Au-delà des outils, il entend promouvoir des méthodes : le partage du code, la confiance envers les développeurs, l’accueil de la contribution.

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« L’Etat doit s’organiser pour s’approprier l’innovation plus rapidement, pour expérimenter en permanence et pour anticiper les usages qui peuvent être faits des dernières avancées technologiques », déclare Henri Verdier, directeur de la DINSIC (direction interministérielle du numérique et des systèmes d’information et de communication), au sein du SGMAP. Il enchaîne sur la méthode : « Pour réussir à décupler notre capacité d’action, il nous faut nous allier aux communautés de développeurs et mieux travailler avec les milliers d’agents publics qui y contribuent. »


Le rôle des communautés du logiciel libre est essentiel à la fois pour bénéficier de codes de qualité, maintenus et améliorés en permanence, pour mutualiser les ressources et les expertises entre les services de l’Etat, mais également pour s’ouvrir vers l’extérieur. C’est un moyen de dynamiser les projets et de contribuer à leur pérennité. « La volonté d’ouverture constitue l’une des priorités de cette année 2016 », insiste Emmanuel Raviart, directeur technique de la mission Etalab, en charge de la politique d’ouverture des données publiques, de l’open data et de l’open source.


Un forum public consacré à l’open source

Signe de cette nouvelle ambition, Etalab a ouvert en février dernier un forum pour débattre avec les acteurs du libre, internes ou externes à l’administration, notamment sur les stratégies d’achat de l’Etat.

D’autres initiatives traduisent cette politique d’ouverture et de partage. La plupart des développements de la DINSIC sont partagés en open source : l’API de géolocalisation des taxis disponibles, développée par la startup d’État Le.taxi, est mise à la disposition de tous et son code peut être repris et enrichi, tout comme le simulateur fiscal et social OpenFisca , qui a pris un nouvel essor grâce aux contributions d’acteurs des sphères publique et civile. C’est également le cas de la plateforme data.gouv.fr , dont le socle, en open source, a été retenu par le Duché de Luxembourg pour outiller sa démarche open data (voir data.public.lu ). Deux autres pays sont en passe de faire de même, donnant ainsi naissance à une véritable petite communauté de développeurs.


L’Etat se dote de sa propre infrastructure cloud

Le logiciel libre et ses approches sont également une réponse aux enjeux de modernisation du système d’information de l’Etat, y compris pour ses chantiers les plus importants. Ainsi, pour accueillir les applications sensibles, celles qui ne peuvent être hébergées sur des plateformes externes, l’administration s’engage dans le développement de sa propre infrastructure cloud, qui sera gérée notamment avec des outils open source.

Plusieurs expérimentations sont menées actuellement autour du package OpenStack pour orchestrer la gestion des ressources d’infrastructure, de la base de données MongoDB comme solution de stockage en mode distribué et de Docker pour la gestion de conteneurs de services applicatifs. Ces technologies favorisent les approches mutualisées et s’inscrivent dans le développement d’une offre de services interministérielle, à l’instar de ce qui a été réalisé avec le socle d’archivage Vitam .


De nouveaux terrains de jeu

« Les choix opérés garantissent une cohérence globale et les interfaces de programmation proposées assurent l’interopérabilité entre les plateformes », souligne Alain Merle, directeur du programme transformation des centres informatiques à la DINSIC. Le Cloud n’est pas le seul terrain d’expression pour le logiciel libre au sein de l’Etat. La troisième édition du socle interministériel des logiciels libres (SILL 2016), sortie juste avant la fin de l’année, s’intéresse également au mobile et préconise pour la première fois des solutions pour le système d’exploitation Android. Quant au Référentiel général d’interopérabilité, publié en avril dernier, il a été salué par les communautés du libre pour son attention aux formats ouverts et interopérables.

Au-delà de l’informatique, « le modèle de conception du libre est extensible aux contenus pédagogiques que les enseignants pourraient être amenés à co-construire », estime Mathieu Jeandron, directeur du numérique pour l’Education. Là encore, les communautés seraient en première ligne pour organiser les collaborations.