Vitam : une organisation entièrement tournée vers l’agilité


Inauguré en mars 2015, le programme Vitam connaîtra début 2016 le nom des différents prestataires chargés du développement et de l’intégration du futur logiciel d’archivage électronique pour l’administration. Principale originalité de l’appel d’offres : il fait la part belle aux approches agiles et laisse la place aux PME innovantes.

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C’est une première. Au sein de l’administration, jamais projet d’une telle ampleur n’aura été autant emprunt de méthodes agiles. Le projet en question, Vitam, pèse 15 millions d’euros. Il vise le développement d’un socle d’archivage réutilisable par toutes les administrations. Il équipera dans un premier temps trois ministères (Culture, Défense, Affaires Étrangères), tous parties prenantes dans sa conception.

En quoi la conduite de ce projet d’archivage sera-t-elle agile ? La réponse est dans la structure même de l’appel d’offre, fruit d’une intense collaboration entre l’équipe Vitam, la direction interministérielle du numérique et du système d’information et de communication de l’Etat (DINSIC), au sein du SGMAP, et le service des achats de l’État : particulièrement originale, elle fait la part belle aux petites équipes, notamment aux PME innovantes. Mais surtout, son découpage en plusieurs lots laisse une place prépondérante à la créativité et à la réactivité des développements.

Aligné sur les priorités de la DSI de l’État

Rappelons que cet ancrage de Vitam dans l’agilité traduit la volonté de la DINSIC – la DSI de l’État - de privilégier des chantiers informatiques de petite taille, s’échelonnant sur des délais relativement courts. L’objectif : se prémunir des retards, et produire des livrables qui restent alignés sur les besoins initiaux. La DINSIC préconise ainsi des approches agiles basées sur un enchaînement de cycles courts (quelques semaines) à l’issue desquels des contrôles réguliers permettent de vérifier le fonctionnement et l’ergonomie du produit. Résultat : nul besoin d’attendre la livraison finale pour corriger le tir en cas d’éventuels dysfonctionnements.

Ces itérations associent les différents profils concernés par le projet : responsable produit, développeurs et utilisateurs. En testant les fonctions et la qualité des livrables, l’utilisateur final participe donc activement à l’orientation et aux développements du produit.

L’agilité pour absorber les technologies du big data

« Vitam se prête particulièrement aux approches agiles. Par sa taille déjà : il a beau être conséquent, avec une soixantaine de personnes à terme, il reste à échelle humaine, ce qui facilite la constitution de petites équipes », explique Jean-Séverin Lair, directeur du programme. Mais c’est surtout la nature des nouvelles technologies au cœur de Vitam qui imposera de l’agilité. Seules les solutions issues du big data seront à même de relever le défi de l’archivage des milliards d’objets numériques produits ces prochaines années par les administrations de l’État. « Or il nous faut évaluer ces technologies et recourir, selon les besoins qui seront identifiés, à plusieurs expertises pointues », poursuit-il.

Paralléliser les travaux dans une logique de rentabilité

Comment concrètement l’équipe Vitam prévoit-elle de structurer ses travaux ? Dans le volet développement du marché, le cahier des charges prévoit deux lots. Tous deux alignés sur les principes d’agilité décrits plus haut. Le premier concerne le développement des « fondations » de Vitam, autrement dit de l’ensemble des fonctions classiques de l’archivage (indexation, versement, gestion des métadonnées, stockage, pérennisation des fichiers, recherche, etc.). Ce lot sera attribué à deux titulaires distincts. Une telle fragmentation permet de paralléliser les travaux, dans une logique de rentabilité, et d’associer un large scope d’industriels à la consultation, quelle que soit leur taille. Les PME notamment. Le second lot, lui, sera attribué à un seul titulaire. « On attend de lui qu’il sache trouver les compétences rares dont nous aurons éventuellement besoin, notamment dans le big data. Expertises qu’il devra coordonner. » Et là encore, de petites sociétés innovantes pourraient être mises à contribution.

Industrialiser le socle avec une couche qualité

Mais si le cahier des charges sanctuarise l’agilité tout au long des développements, il réserve un lot plus classique à l’industrialisation de Vitam. Rappelons en effet que le socle (entièrement libre via une licence de logiciel libre CeCILL) a vocation à être réutilisé par l’ensemble des administrations qui le souhaitent. Son installation doit être aussi simple que celle de n’importe quel logiciel du marché. D’où le lot spécifique que le cahier des charges a dédié à cette réutilisation : « Les agilistes bâtiront le socle dans un contexte qu’ils maîtriseront et pour lequel ils seront extrêmement réactifs, précise Jean-Séverin Lair. Mais pour être exporté dans d’autres administrations, le socle doit être renforcé par une couche de contrôle et de qualité, dont un des effets sera le rajout de composants nécessaires à son déploiement et la publication d’une documentation adaptée. »

Des prestations contrôlées par l’administration

L’association d’un développement en mode agile avec une phase d’industrialisation plus « classique » permettra donc d’allier rapidité d’exécution, créativité, rigueur et qualité. Elle présentera également l’avantage de diversifier les fournisseurs de manière à équilibrer leur poids au sein du projet. Cette pluralité s’inscrit dans une logique de maîtrise renforcée des prestataires. Avec Vitam, l’administration pilotera l’ensemble des prestataires, encadrera la bonne tenue de leurs objectifs respectifs mais restera responsable, et donc maître, de la réalisation d’ensemble.